<Glazblog/>

Logiciel, formats et tout ça

Suite à ma réponse à François Miclo, Tristan a chopé la balle au bond et pondu deux articles entre deux avions. Il devrait y en avoir deux autres mais ces deux-là appellent déjà, et leurs commentaire avec, à réponse de ma part.

Je pense qu'il y a confusion majeure entre logiciel closed-source et format fermé. Or cela n'a rien à voir. Un logiciel comme le célèbre XMLSpy est closed-source, propriétaire, commercial, et il est pourtant totalement ouvert en termes de formats d'entrée et de sortie. Alors qu'un logiciel open-source CMS basé par exemple sur une grammaire Wiki donnée est de mon point de vue fermé puisque le langage de données qu'il utilise n'est pas directement lisible par un autre CMS (il y a n grammaires wiki différentes avec n grand, malheureusement). Certes, certes, on pourra toujours écrire un filtre, sauf pour les commandes spécifiques à l'outil. Ce n'est qu'un exemple, on peut en imaginer plein d'autres, il en existe plein dans le monde réel.

De plus, il ne faut non plus lier le statut du logiciel (proprio, libre/open-source) à sa pérennité. Notre monde est plein de softs qui ont disparu parce que la boîte qui les vendait/commercialisait a fermé, mais aussi également parce que les développeurs/contributeurs au projet libre/open-source sont passés à autre chose. Même les standards meurent un jour. Qui a encore du gopher ? La problématique de la conservation et de la pérennité des données dépasse largement le cadre du statut du logiciel. Les grandes entreprises qui sont légalement tenues de conserver des données 30, 60 voire 150 ans le savent bien.

Quant aux brevets sur le Logiciel, je rejoins totalement Tristan. Je suis totalement contre. J'ai eu à ce sujet une longue et houleuse conversation avec un copain de promo qui bosse à l'Office Européen des Brevets. Là-bas, ils sont pour. A fond. C'est tellement con et contre-productif... A se demander s'ils ont la moindre connaissance du tissu indsutriel de l'Europe dans ce domaine ou s'ils ne connaissent que les quelques grands groupes qui brevetent. Il faut se rappeler que Thomson dépose par an en brevets ce que Hitachi dépose par semaine... Au contraire de la valorisation annoncée de nos innovations, cela sera le fossoyeur de nos petites boîtes de logiciels comme la mienne. Il faut savoir que des recherches en IPR lors de la création/commercialisation d'un logiciel, si les brevets logiciels passent en Europe, coûteront à vue de nez 50k€ par soft. Ce chiffre n'est PAS pifométrique, je suis assez bien informé sur le sujet. Bref, il sera désormais quasiment impossible de lancer un soft sans disposer d'un capital conséquent à la base et surtout d'un bon avocat spécialisé. Je considère qu'il est dangereux, profondément dangereux, d'autoriser le brevet d'éléments immatériels. Un élément d'interface utilisateur est immatériel. Un code est immatériel. Protéger son code via l'INPI pour contrer le plagiat du code, d'accord. Aucun souci là-dessus. Protéger comme Adobe l'avait fait en son temps les fenêtres flottantes, non. Sinon, on va se retrouver avec des brevets et des patent trolls dans tous les sens. On va breveter les sliders, les fenêtres glissantes, les fenêtres dépendantes, les fenêtres non rectangulaires, les dialogues modaux, tout. Et dans le domaine des fonctionnalités ce sera pareil voire pire. Le frein à la diffusion de l'innovation sera terrible parce que les brevets logiciels vont créer des nouveaux monopoles. Je le redis : les brevets européens sur les logiciels seront le fossoyeur de notre industrie du Logiciel, qui est seulement balbutiante. Lui planter un couteau dans le dos n'est pas une bonne idée.

Comments

1. On Wednesday 10 December 2008, 13:20 by Pierre

Je ici trouve ce qui me manquait dans ton billet précédent, i.e. la note sur les formats.

2. On Wednesday 10 December 2008, 16:17 by Dominique De Vito

Ce que je trouve le plus aberrant dans cette histoire de brevet logiciel de l'OEB, c'est que l'OEB semble s'être arrogé le droit, d'après ce que j'ai cru comprendre, d'accepter ces brevets sans qu'ils soient véritablement autorisés par la loi. En effet, l'article 52 de la Convention sur le Brevet Européen (CBE) de 1973 exclut – en Europe – certaines inventions du champ de la brevetabilité, en particulier les méthodes mathématiques et les programmes d'ordinateurs en tant que tels. A ce jour, l'OEB a déjà accepté nombre de brevets logiciels.

Quoiqu'il en soit, l'OEB me semble avoir largement outrepassé ses droits et je n'ai pas vu de sanction passer. Je considère cela comme un laisser-aller honteux qui devrait être sévèrement sanctionner. Malheureusement, et tout à fait bizarrement, je n'ai jamais lu, ou entendu qui que ce soit, parler de reprendre le contrôle sur les dérives hors-la-loi de l'OEB, qui est, pourtant, un organisme européen.