Qui arrêtera les logiciels fous de l'État ?
By glazou on Tuesday 19 December 2017, 12:25 - Franchouillardises - Permalink
Je l'avoue, j'ai sans vergogne piqué le titre d'un article du Point Éco, parce que la question posée est excellente. Elle rejoint parfaitement mon propos lors de mon passage récent sur France Culture dans l'émission matinale de Guillaume Erner. Avant de lire la suite, prenez quelques minutes pour lire cet article de Libération également.
Ça y est, vous êtes prêts ? Bien. Alors voilà : contrairement à ce que raconte l'article du Point, je ne crois pas du tout que « faire appel à des start-ups » sera la solution qui permettra à l'État de cesser de dépenser entre 10 et 50 voire 100 fois (excusez du peu...) trop pour ses logiciels. Et encore, quand ils marchent, parce qu'il arrive souvent qu'ils ne fonctionnent jamais correctement voire jamais tout court.
La solution est un changement de perspective : il faut que l'État passe du « Not Invented Here » au « Invented Here ». En clair, il est temps d'arrêter de se reposer essentiellement sur des ressources externes (SSII) atrocement coûteuses mais surtout non fiables ni dans l'immédiateté ni dans la durée. L'État doit au contraire renforcer très nettement ses capacités internes de développement informatique. L'économie réalisée sur les prestations (SIRHEN ? Un demi-milliard d'euros et ce n'est toujours pas fini. LOUVOIS ? Un autre demi-milliard d'euros en tout et ça ne marche pas du tout) permettra de staffer non pas des fonctionnaires mais des contractuels de qualité payés au prix du marché. Même avec un tel recrutement contractuel et même en n'arnaquant pas l'État, la structure réalisera des gains substantiels permettant de continuer les embauches et assurer l'expansion. De toute manière, les dépenses actuelles sont telles qu'on ne peut que faire nettement mieux et donc économiser vraiment énormément. Évidemment, la structure en question devra être strictement interne à l'État, elle ne peut entrer en concurrence avec les ESNs (anciennes SSII) sur le marché global.
Internaliser évitera de perdre les développeurs et leurs compétences, assurera la pérennité et surtout la disponibilité de l'expertise, réduira très fortement les coûts et enfin améliorera drastiquement la qualité. Seule une structure pérenne, avec des gens de haut niveau payés à hauteur de leur haut niveau, peut aujourd'hui stopper la gabegie hallucinante à laquelle nous assistons. C'est parfaitement faisable et c'est faisable vite si on le veut. À bons lecteurs...
Comments
Que de bon sens Daniel (comme d'habitude), malheureusement non partagé par nos politiques...
Mais la SSII rassure (l'État ou les collectivités), surtout si elle est grosse (« Too big to fail »). La SSII est un interlocuteur sur lequel on peut taper si ça ne marche pas (mais sans jamais le faire bien évidement).
Pourtant, il y a des exemples qui prouve que ça peut marcher (je pense à GendBuntu, même si ce n'est qu'une adaptation).
Comme tu le dis si bien tout ça n'est qu'une question de volonté...
L'exemple de ce modèle, c'est le succès de https://www.gov.uk et du Government Digital Service.
C’est ce qu’on a fait en Belgique avec succès avec l’asbl Smals pour les développements dans la sécurité sociale
Sans aller jusqu'à tout internaliser (j'y suis favorable mais je ne vois pas le truc arriver), je crois qu'a minima, il faut que les donneurs d'ordre dans l'Etat comprennent ce qu'on leur vend, qu'ils aient une idée de l'ordre de grandeur de ce dont on a besoin pour faire tel truc. Là ils peuvent discuter avec des SSII de manières plus égales.
@Julien W : Ce serait un premier pas effectivement.
Je ne suis, cependant, pas sûr qu'ils ne s'en cognent pas complètement...
Voire qu'ils ont un intérêt quelque part à ce que ce soit surpayé